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A Paris, le blues des analystes financiers

LesEchosLe nombre d’analystes financiers a été divisé par deux en 15 ans. Les marchés ont beau être au plus haut depuis 2007, l’ambiance est morose.

 

Ils étaient 700 en 2000. Et 500 en 2005. Les analystes financiers de la place de Paris ne sont plus que 232 aujourd’hui. « Dans quelques années, ils seront encore moins nombreux », prédit un observateur des marchés. La directive européenne MiFiD II, qui a rendu l’analyse financière payante, n’a pas encore produit tous ses effets. Pour 2020, les gérants d’actifs négocient à la baisse les tarifs avec leurs brokers.

En vigueur depuis deux ans, MiFiD II n’est pas la seule cause de cette hémorragie. La crise financière est passée par là. Et les entreprises françaises n’aiment plus la Bourse : de 818, il y a dix ans, les entreprises cotées sont passées à moins de 700. Certains établissements parisiens ont délocalisé leurs activités de courtage actions à Londres. La gestion passive indicielle a explosé. Les commissions de courtage ont beaucoup baissé.

De véritables stars

« Il y a 20 ans, certains analystes avaient le statut de stars à Paris. Ils avaient des idées originales, contrariantes, et bien argumentées, avec une connaissance approfondie du secteur. Cela faisait d’eux des gourous dans leur domaine. Leur travail était intensif mais parfois avec des conditions de rock star. L’un d’entre eux, chez Lehman Brothers, racontait avec jubilation que quand il descendait de l’avion, une limousine l’attendait sur le tarmac », raconte Vally Colli, associée du cabinet de chasse de têtes Vendôme Associés. « Les rémunérations globales pouvaient être très élevées : les bonus représentaient parfois de deux à trois fois le fixe, pour un total pouvant atteindre 500.000 euros ». Aujourd’hui, les bonus sont plus contenus à cause de la réglementation mais les fixes ont augmenté pour compenser.

analystes financiers -reproduction -

Les analystes démarrent très tôt pour préparer le « morning meeting » de 8 heures. Ils donnent aux vendeurs les munitions nécessaires pour appeler leurs clients. Ils ont les yeux rivés sur la moindre information financière concernant les sociétés cotées qu’ils suivent. Depuis les années 2000, ils sont aussi en contact direct avec les clients et prospects.

Leur temps de parole facturé

La directive MiFid leur impose désormais de facturer ce temps de parole. « L’autre jour, j’ai croisé un client. Je lui ai parlé de la pluie et du beau temps. Il m’a demandé si cette conservation allait lui être facturée, grince un professionnel. Avant, je pouvais parler avec beaucoup de gérants, aujourd’hui, non. Je me nourrissais de leurs questions, de leurs réflexions. Aujourd’hui, je ne peux parler qu’avec nos clients. Ce qui est assez limité ».

Les marchés sont au plus haut depuis douze ans et pourtant l’ambiance est morose. « Très souvent les gérants n’ont pas profité de la hausse des marchés. Les clients ne sont pas contents et tout le monde est sous pression », raconte un analyste. La pression s’est encore accentuée du fait de la consolidation des brokers. Après Oddo BHF et Natixis , à l’été 2018, MainFirst Bank, a repris les activités de Raymond James à Paris et à Londres. D’autres rapprochements pourraient suivre.

Comme le reste de l’industrie, le métier peine à séduire les jeunes. Certains pensent que l’avenir des analystes est dans l’ESG (Environnement Social Gouvernance). Mais les chasseurs de têtes ne croulent pas sous les demandes d’emploi.

 

Par Laurence Boisseau, le 28 janv. 2020

LesEchos

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